mardi 26 janvier 2021

Amani : un parfum d’alchimie


 ( Réponse à « La belle saison hivernale de Bernard Abel » par Amani Lizah Glaise )



« Nez à nez ». Comme c’est joliment exprimé ! Une métaphore bien sûr, une façon de parler. En réalité, quelques mots échangés sur la toile, un jour d’été, et se révélant, au fil des échanges, comme d’inattendus sésames : clefs actionnant des portes nouvelles et ouvrant magiquement sur de nouveaux univers.

Oeuvre de Bernard Abel
Qu’est-ce qu’un univers artistique ? Une âme extérieure, une part de soi qui s’extériorise, qui s’exprime, qui s’exporte et qu’on rêverait, si possible, immortelle. Une sécrétion.

Nous sommes, au fond, des coquillages. Fragiles à l’intérieur, et nus, nous nous inventons une efflorescente coquille, sculpture de nacre fraternisant avec la pierre ; laquelle pierre en recueillera, un jour peut-être, l’empreinte fossile, l’image en creux, gage d’une immortalité plus grande encore.

L’immortalité. Sans doute nos vues divergent-elles à ce sujet. Nos univers, ici, s’observent, s’écoutent, se respectent et gardent leurs distances. Mais le soin maniaque dont nous entourons, toi et moi, nos artistiques sécrétions nous rapprochent, révélant, au-delà de ce qui nous sépare, une évidente communauté d’esprit, une évidente convergence.



La perfection est une lutte de toujours, un combat ancestral, une titanomachie opposant, à perpétuité, le permanent et le périssable. Ainsi nous acharnons-nous, tous les deux, au même et quotidien combat, dans l’espace clos de nos ateliers respectifs, revendiquant là le simple droit d’être nous-même, contre les rappels à l’ordre malheureusement trop constants de la réalité commune.

Appelons cela notre sauvagerie. C’est un mot que je t’emprunte. Sauvagerie ou encore perfectionnisme : c’est à peu près la même chose.

Ce perfectionnisme, nous le partageons, contre vents et marées. Il nous habite tous deux, nous confrontant aux mêmes exigences, engendrant, de part et d’autres, les mêmes déceptions, les mêmes frustrations ; et parfois aussi, espérons-le, les mêmes plaisirs. Tu ne te satisfais que rarement de ce que tu exprimes, je le sais, comme je me satisfais rarement, ainsi que tu l’écris si justement, de moi-même. Plus encore, tu doutes de toi. Une critique t’ébranle. Et ébranlé, qui ne le serait pas ?

Critiquer l’œuvre d’un artiste, c’est risquer de mettre à bas tout un pan de sa vie. Il arrive ainsi que nos pas s’accordent et se croisent. Autant dire que nous nous comprenons. Ou, plus exactement, que nous travaillons à nous comprendre.

Madone fossilisée -
Oeuvre de Amani Lizah Glaise

Il arrive encore qu’un thème nous rapproche au point, presque, de nous confondre. Ainsi cet intérêt partagé pour la représentation du corps féminin. Thème largement traité, il est vrai, dans le monde des arts plastiques, mais qui se pare, chez toi comme chez moi, il me semble, d’un accent particulier, d’une tension douloureuse qui confine parfois à une sorte de voluptueuse brutalité. Brutalité de ces sentiments trop intenses qui tétanisent les corps, qui les foudroient, qui les dévorent de l’intérieur.

Corps vécus plutôt que représentés. Corps centrés, concentrés sur eux-mêmes plutôt qu’en dialogue avec le monde extérieur.




Je relis à présent les lignes que tu me consacres et une image s’impose à mes yeux : Vénus, née d’un coquillage sous le pinceau de Botticelli, exposant au monde sa beauté fragile en attendant de s’élever, astre rayonnant, jusqu’au ciel. La beauté donc, la nudité, l’immortalité, tout cela réuni en une vision unique : un corps de femme. Tout cela et une chanson de Francis Cabrel « d’une beauté et d’une tristesse », écris-tu, «absolues ».

Je m’interroge. Pourquoi ces rapprochements ?

Il y a ta voix, bien sûr, qui, un certain soir d’hiver, s’est imposée à moi, sous la forme d’une chanson mythique, tragique. Et puis il y a ton visage, ton corps, qu’il t’est arrivé d’offrir au regard d’une parfaite photographe et qui m’a fait écrire, si je me souviens bien, que tu étais toi-même une parfaite œuvre d’art. Il y a ton peu de goût encore pour l’élément liquide, ainsi que tu me l’as un jour avoué, et qui te rapproche de cette Vénus, née, dit-on, de la mer, mais voguant prudemment, les pieds au sec, sur sa barque-coquillage.

Au fait, la chanson de Francis Cabrel serait-elle une métaphore, en forme de métamorphose, du destin de Vénus : divinité de chair, portée à incandescence dans la noirceur cuivrée de tes tableaux, et accédant, dans un « éclair blanc », à la clarté astrale d’une « nouvelle église » ? Qui sait.

Bernard Abel

24 janvier 2021

jeudi 21 janvier 2021

La belle saison hivernale avec Bernard Abel

Portrait d'Amani L. Glaise par Bernard Abel


Au départ, il y a eu l'été 2020 où je suis tombée "nez à nez" avec Bernard Abel, un écrivain et un musicien ; un illustrateur aussi : un univers varié, riche comme je les apprécie. Tout un éventail de savoir-faire à découvrir !

Nous avons donc commencé par échanger alors qu'il était en plein dans la rédaction de son livre "Un sentiment d'infinité". 



Autoportrait - Bernard Abel



Bernard est un passionné. Quand il parle d'un sujet, tout son être vibre. Tout est axé sur son sujet favori du moment. C'est un scrutateur du détail, même s'il n'englobe que quelques éléments épars de ce qu'il tente de toucher au travers des lignes, qu'elles soient manuscrites, ou bien peintes... 

Bernard Abel

Il y a quelque chose de profond et de profondément poétique dans son art. 

Bernard Abel m'a fait l'honneur de réaliser de belles esquisses de moi. Il possède cette finesse d'exécution, de recherches inlassables, de perfectionisme exacerbé qui caractérise ce qu'il est, de mon point de vue. Il veut que tout soit parfait... et même quand cela atteint un point culminant de réalisme, il n'en semble que peu satisfait... 

Portrait d'Amani L. Glaise par Bernard Abel

Je crois qu'il parvient quand même à bien cerner qui je suis. Pas en tout ; je vous l'ai dit, il s'émerveille de détails en tous genres. Mais il m'a perçue ; il a perçu ce que je voulais être ici bas ; qui je suis devenue au travers de mon parcours artistique qu'il a donc détaillé pour comprendre mon art et une part de ma personnalité. Et parce qu'il a cette faculté de pouvoir se régaler d'infimes plaisirs, comme celui de marcher pieds nus dans la neige, de sentir la caresse de la chaleur d'un feu de cheminée ou bien de compter le nombre incalculable de statues du Christ qui se dressent dans la nature Alsacienne, il comprend, me semble t'il, que moi aussi je suis attachée aux détails...

Bernard Abel

Bernard Abel a aussi participé aux Expos virtuelles et collectives Artémis, élaborées par Christian Dehais avec mon concours,  aux côtés d'autres artistes, en septembre 2020.



Au début du mois de janvier, comme un cadeau de noël en retard, Bernard m'a fait une surprise. J'avais interprété a cappella une chanson de Francis Cabrel en m'enregistrant sur mon téléphone. Je lui avais envoyé mon fichier audio et il a rajouté la partie instrumentale qu'il a joué à la guitare. Notre amitié artistique est sans attente aucune. Elle est caractérisée uniquement par du partage : il m'envoie parfois des photos de ses paysages hivernaux alsaciens, des morceaux de ses propres compositions musicales et me donne des nouvelles de ses avancées littéraires... Comme il m'arrive souvent de m'enregistrer pour le plaisir (et souvent avec ma fille aînée), je lui ai partagé cette chanson d'une tristesse et d'une beauté absolues ainsi que ma voix...

Quand il m'a fait part de la composition de notre duo imprévu, j'ai été subjuguée par le rendu et ai vite imaginé une mise en lumière artistique entremêlée de nos oeuvres picturales respectives. 



Une idée créative en amenant toujours une autre, je me suis rendue compte que tout le panel artistique de Bernard se diluait de façon éparse et je lui ai donc proposé de lui configurer un site web afin de réunir cet attirail poétique en un seul endroit, à son image, telle que je la percevais, moi ! 

Et il m'a donné carte blanche, et ce, de manière très libre. 

Loin de moi l'idée de penser connaître Abel par coeur. Il y a trop à découvrir... et ça se passe, ici :

Site de Bernard Abel : https://bernardabel.wixsite.com/b-abel